Dans cette déambulation, vous allez contempler des femmes de toutes origines comme le laisse entendre le titre de cette troisième exposition : World Wide Women - Femininity.
Tout ce que vous allez voir est essentiellement de la photographie, au sens premier du terme, c’est à dire, des images écrites avec de la lumière, puis travaillées comme on le faisait lorsqu’on développait la pellicule.
Du travail sur les contrastes, les couleurs, et la profondeur de champs, tout cela avec un seul but : magnifier la réalité, en faire un point d’entrée pour le spectateur que vous allez être, avant de vous laisser ensuite déambuler au-delà des photos, grâce à votre imagination.
Alors bonne déambulation, et bon voyage...
Photographie je vous disais. Ecrire avec la lumière, utiliser le contre-jour et le flou pour rendre le modèle anonyme et en exacerber la part de Féminité qu’il peut incarner. Ici, seules les formes sont suggérées, c’est votre esprit qui recompose la réalité. Plus vous reculerez, et mieux vous la devinerez.
Créer un cadre dans le cadre avec des lumières rasantes et des perspectives écrasées sur un pont parisien. Faire exister les ondulations du modèle, par contraste avec les rectangles et les lignes du décor. Une Féminité toute en courbes, sur un fond urbain anguleux et droit.
Utiliser cette fois la matière pour définir les contours et les courbes d’une silhouette, transformer des tissus en robe, pour mettre en valeur des formes sans jamais les dévoiler. Je vous avais prévenu, il va falloir faire travailler votre imagination.
Jouer avec la courte profondeur de champs, mais aussi avec les gouttes et les reflets sur un miroir. Approchez-vous d’abord, vous n’y distinguerez que l’eau, ensuite, prenez du recul et vous découvrirez peu à peu le modèle. Moins vous tenterez de le fixer, et plus il s’imposera. Ce n’est qu’un effet d’optique, pas une métaphore… quoi que ;-)
Ici, seul le verre est net, et pourtant, quelle que soit votre distance, c’est inlassablement sur le visage que votre regard reviendra. Enfin normalement, sinon, n’hésitez pas à consulter rapidement un ophtalmologiste.
Enfin, pour terminer cette introduction, un grand classique de la photographie, le contre-jour, réalisé au petit matin face au Pacifique sous la lumière naissante de la côte Ouest Californienne. Une nuance colorée sur lequel le profil vient se dessiner, créant une ombre de Féminité dans un dégradé de couleurs.
Il est temps de vous présenter AYA, une artiste peintre qui a accepté de se joindre à cette exposition. Elle a décliné, avec sa sensibilité, quelques unes de mes photos en peinture. Une réinterprétation qui débute ici, avec l’esprit de la photo, revisité avec sa sensibilité et son point de vue.
Allons maintenant un peu plus loin dans les contre-jours, avec ce diptyque. Tout d’abord, en haut, une silhouette dont la chevelure blonde s’illumine en transparence dans le soleil d’une fin de journée. Une amazone à la chevelure flamboyante…
...à laquelle vient répondre cette autre transparence, comme un écho, presque un négatif. Ici, ce sont les tissus qui captent la lumière, et redessinent les contours. Une même technique, pour deux résultats diamétralement opposés, seulement réunis par cette mise en exergue d’une part de Féminité.
Jouons maintenant avec les reflets. Quoi de mieux pour susciter l’imagination ? Tout d’abord ceux de l’eau, dans lesquels viennent se noyer les détails du visage du modèle, alors que la silhouette s’étire en se dupliquant et gagne ainsi en élégance.
Les reflets dans les vitres à présent : un des plus anciens trucages de photographe qui donne de la transparence et rend le modèle fantomatique, presque irréel, comme un mirage dans la chaleur qu’il tente de dissiper avec son ventilateur.
Reflet dans un miroir, à travers lequel on tente de recomposer le visage que le photographe a malicieusement tronqué. Tout est donc là, mais encore une fois, c’est en prenant du recul que vous aurez le meilleur point de vue.
Miroir encore, double cette fois. Celui de gauche est légèrement flou, car plus proche de nous. C’est donc à vous de choisir à travers lequel vous souhaitez la contempler, dans ce moment d’abandon qui précède son bain, et qui lui va si bien.
Un dernier miroir, plus malicieux encore, car vous n’en verrez pas la limite, elle se fond dans une parfaite symétrie, et se fait donc totalement oublier. Elle vous laisse ainsi en tête-à-tête avec le modèle, qui se préparait juste avant le shooting, ou peut-être avait-il deviné qu’il avait déjà commencé.
Vous venez d’entrer dans la chapelle, dont les premières pierres ont été posées il y a 300 ans. Sans remonter aussi loin, faisons, nous aussi un voyage dans le temps, avec quelques décors anachroniques et une teinte sépia qui ancre inconsciemment le cliché dans une époque lointaine. Dans cet immense et spectaculaire escalier d’un lieu aujourd’hui abandonné…
Dans cette salle de bain des années 50, où l’eyeliner en vogue à cette époque se reflète dans un miroir piqué par le temps
Ou encore au travers des pensées lointaines de cette housewife esseulée, fixée sur la pellicule dans un loft anachronique de Brooklyn dont les propriétaires ont su conserver le charme dans années 60 avec quelques objets de collection.
La voici à nouveau, recadrée et repensée par AYA, se focalisant uniquement sur le modèle, pour en mettre en exergue les traits teintés d’une légère mélancolie.
Passons maintenant à ce qui fut le premier exercice de style d’Emmanuel, le portrait. Tout d’abord avec une lumière rasante, qui ne retient que l’essentiel des contours du visage, comme s’il s’agissait de furtifs coups de crayons blancs qui viennent trancher dans la profondeur absolue du fond noir.
Revisité également à travers les traits de pinceau d’AYA.
En couleur ensuite, avec des blancs lumineux et dilués dans un léger flou, qui par opposition, viennent souligner la puissance du regard aussi net que coloré, dont vous n’arriverez plus à vous détacher.
Enfin un autre Noir et Blanc, qui dessine son profil quasi égyptien avec plus de nuances dans les lumières, et fixe notre regard au centre de l’image sur l’œil et la courbure de la pommette.
Avant de poursuivre, en cette période de Festival de Cannes, prenons le temps d’un premier détour dans le monde du cinéma. Aidées par des lunettes, des chapeaux, ou d’autres apparats, voici quelques images qui ont imprégné le 7ème art d’une iconique dose de Féminité.
Choisir le cadre pour dissimuler une partie du modèle, et laisser ainsi le spectateur imaginer ce qu’il ne voit pas, comme un lecteur donne vie à un personnage de roman en fonction de son imagination ou de son vécu. Voici quelques points de départ, aussi anonymes que Féminins.
Jouons maintenant encore plus avec la lumière, et redessinons la réalité en surexposant les images. Jamais votre œil ne verra cela, car il s’adapte en permanence sans que vous ne puissiez le contrôler. Seul le capteur de l’appareil photo peut être saturé de lumière, et ne garder visible qu’une partie de l’image.
Comme cette silhouette qui semble apparaître dans un bain de lumière...
...ou ce visage dont une partie des contours disparaissent également, donnant plus d’intensité à la chevelure, aux yeux et à la bouche...
...tels qu’AYA les a reproduits également.
Surexposée, et victime d’un flou de bougé, aucun technicien de la photographie n’aurait validé ce cliché. Et pourtant, dans ce chaos technique, les boucles de cheveux et l’intensité du regard prennent vite le dessus...
Comme a également su le saisir AYA.
Pour aller au bout de l’exercice, voici un ultime cliché réalisé dans Grand Central, l’immense et magnifique gare de New-York. Un modèle figé, et un interminable temps de pose pour n’isoler que la silhouette immobile, et faire miraculeusement disparaître les passants superflus. Pour capter la féminité, il faut donc savoir patienter.
Dans ces jeux avec la lumière, l’eau est souvent une très belle alliée. Elle filtre les couleurs, crée des transparences, et redessine la réalité avec des reflets saccadés comme dans cette piscine.
Utilisée en contre-jour, elle crée un décor fascinant, comme ici avec les jets d’eau dans les bassins du Trocadéro à Paris,
pour tenter de protéger un modèle de nos regards,
ou dévoiler des courbes en transparence.
Cette sensualité créée par l’eau, le cinéma l’a souvent utilisée. En bord de mer, en piscine, ou dans des salles d’eau, le 7ème art regorge de scènes cultes qui ont marquées son histoire.
Appuyez maintenant sur Pause, et plongez dans quelques séquences inoubliables, fixées en 25 images par seconde sur de la pellicule 35 mm. Voici la Féminité, l’eau et le cinéma, mis en scène par Romain Lalire.
Echanger un petit coin de parapluie, contre un coin de paradis, c’était la chanson de Brassens. Voici donc quelques coins de paradis, tout d’abord sous les fontaines du Trocadéro, où les éléments semblent se déchainer sur le modèle et son ombrelle.
En contre-plongée sous un pont de central Parc en plein cœur de Manhattan.
Et avec un grain de folie, sous une douche abondante dans les anciens bains de Strasbourg, pour le seul plaisir de faire une photo décalée.
Revenons à plus de tranquillité, en explorant une nouvelle piste graphique pour décliner la Féminité. Dans des draps blancs légèrement surexposés, les limites des tissus s’estompent et se transforment en écrins irréels en sans fin. C’est comme une bulle hors du monde et hors du temps, où la douceur, la quiétude, et la sérénité viennent se refléter sur chacun de ces visages.
La fin de votre déambulation approche, et il est temps de faire une ultime pause, toujours nourrie d’icones cinématographiques. Des silhouettes, des déhanchés, des démarches, bref, de la féminité exacerbée, au service de rôles inoubliables.
Restons dans ces images débordantes de Féminité, où le modèle devient une icône par la simple grâce de sa silhouette.
Totalement saturée de lumière, et dansant sur une esplanade…
...en transparence sur des talons qui semblent indissociables de ses jambes…
...en contre-jour, dansant avec les oiseaux aux premières heures du jour sur la jetée de Santa Monica…
...ou s’illustrant par contraste, apprêtée et sophistiquée dans un lieu dont l’âpreté devient soudainement spectaculaire...
...dans l’eau à nouveau, créant des reflets bleutés sur une peau glacée...
...bucolique, en contre-jour et drapé d’un blanc lumineux...
...ou en transparence, si peu cachée derrière quelques reflets de verrines...
...et décliné ici par AYA.
Enfin, terminons cette exploration par une notion sans doute moins évidente, et pourtant si touchante. L’abandon, cet instant éphémère qui ne se manifeste que très rarement dans une séance photo. Ce moment furtif durant lequel le modèle arrive à oublier totalement le photographe, et se recentre sur lui-même, donnant toute son intensité au cliché.
Ces instants, les voici, tous évidemment teintés de Féminité, parfois même de sensualité.
Je vous laisse les apprécier, avant de profiter du cocktail qui vous sera offert à l’extérieur, à moins que vous ne souhaitiez refaire une visite… Bonne soirée.
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